Ecrit par : Elodie Coipel, Juriste, Avocats Picovschi
SOMMAIRE
Le 2 octobre 2013 la Cour de cassation a rendu un arrêt retenant la responsabilité de l’agent immobilier pour manquement à son obligation de conseil et d’information. Régies par la loi Hoguet du 2 Janvier 1970, ces obligations sont accessoires à la profession d’agent immobilier, et pourtant elles ne cessent de s’amplifier. Après un rapide rappel des faits, il sera mis en lumière la décision de la Cour sur la responsabilité, mais aussi sur les conséquences de cette responsabilité, notamment concernant l’assurance professionnelle de l’agent immobilier.
Rappel des faits :
Un couple achète un appartement via le mécanisme de la défiscalisation, il le donne immédiatement à bail commercial pour une durée de 10 ans, à une société d’exploitation chargée de sous-louer le bien en location saisonnière meublée. Peu de temps après, la société d’exploitation est mise en liquidation judiciaire, le bail a été repris par une autre société d’exploitation. Mais il a été repris à des conditions moins avantageuses. Les époux ont donc assigné en dommages-intérêts pour manquement à son obligation d’information et de conseil, l’agence immobilière spécialisée en immobilier de placement.
Un manquement caractérisé :
Ainsi la responsabilité de l’agence immobilière a été retenue, ayant été le « seul interlocuteur dans cette opération ». Face à des acquéreurs profanes en défiscalisation immobilière, il aurait dû les informer des risques liés à l’opération envisagée.
En effet la Cour retient que « la sécurité annoncée du placement constituant une caractéristique essentielle pour ces investisseurs les avait déterminés à s’engager dans une acquisition dont l’objectif immédiat n’était pas de « profiter » d’un appartement à la montagne ».
Les époux ayant fait du placement une caractéristique essentielle, l’agent immobilier aurait dû mettre en œuvre tous les moyens pour assurer que ces conditions soient réunies. Ou bien leur exposer les risques réels de l’opération, qui les auraient fait renoncer à cet investissement.
En l’espèce l’agence avait manqué à son obligation « en s’abstenant de les alerter sur les risques de non-perception des loyers auxquels ils se trouvaient exposés en cas de déconfiture du preneur à bail commercial, risques dont les stipulations du bail ne permettaient pas de mesurer l’impact sur la fiabilité annoncée du placement ».
Le plafonnement de la franchise d’assurance :
Au-delà du manquement à l’obligation d’information et de conseil, la Cour revient sur la franchise de l ‘assurance de responsabilité civile professionnelle de l’agent immobilier. Cette assurance n’est pas obligatoire, elle est accessoire, mais fortement conseillée.
En l’espèce l’agence a été condamnée en première instance à payer des indemnités au couple à hauteur de 27.005 euros, seulement l’assureur a opposé au couple une franchise de 15.250 euros, soit 56% du montant total de l’indemnité.
Cette assurance n’étant pas obligatoire la Cour considère que « la franchise excédant le plafond réglementaire de 10% des indemnités dues, n’était opposable à l’assuré, et partant aux tiers victimes ».
Cet attendu est favorable aux victimes qui ne pourront plus se voir opposer une franchise excessive, réduisant ainsi le montant des indemnités perçues. La Cour établit donc un plafond qui ne pourra excéder les 10 %.
Elle refixe ainsi le montant de la franchise à la somme de 2.700,50 euros, permettant aux époux de toucher une indemnité de 24.304,50 euros au lieu des 11.755 euros que voulait verser l’assurance.
C’est pourquoi en cas d’investissement dans l’immobilier de placement, et en cas de litiges en découlant, il est préférable de s’entourer de professionnel compétent.
Source : Avocats.fr « Point sur la responsabilité civile de l’agent immobilier » par Gabriel NEU-JANICKI ; www.legifrance.gouv.fr Cour de cassation 1ère Civile, 2 octobre 2013, 12-20504.