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En matière de construction, les constructeurs sont soumis à un régime de responsabilité spécifique, il apparaît primordial d’en saisir toutes les subtilités avant de s’engager en tant que maître d’ouvrage. Avocats Picovschi, compétent en droit de la construction et droit de l’immobilier depuis plus de 30 ans, vous en explique les points clés.
Vers une meilleure protection du maître d'ouvrage
Avant 1978, le système de l'assurance-construction existant ne permettait ni de garantir une bonne protection du maître de l'ouvrage, ni une prise en charge rapide des sinistres.
Les constructeurs n'étaient pas tous assurés. Ainsi, lorsque survenait leur insolvabilité, le maître d'ouvrage n'avait plus que « ses yeux pour pleurer ».
Même lorsque le constructeur était solvable et avait souscrit une assurance, l'indemnisation du maître d'ouvrage était suspendue tant que le responsable n’était pas déterminé.
Pour remédier à la détresse des maîtres d'ouvrage, dont des particuliers en quête d'un logement à faire construire, le législateur a voté une loi d'ordre public dite loi « SPINETTA » en date du 4 janvier 1978, codifiée au sein du Code des assurances.
Les articles L. 241-1 et suivants du Code des assurances instaurent une obligation légale d'assurance à la charge, non seulement du maître d’ouvrage qui fait réaliser des travaux de bâtiment, mais encore des constructeurs.
Le second volet de la loi « SPINETTA », codifié dans le Code civil aux articles 1792 et suivants, et 2270, a consisté à consacrer une présomption de responsabilité décennale du constructeur.
De cette manière, la non-souscription de ces garanties obligatoires (dommages-ouvrage et responsabilité décennale) est passible de sanctions pénales.
En outre, il a créé des garanties facultatives : la garantie de bon fonctionnement et la garantie de parfait achèvement. Il a fait de la réception un acte juridique majeur qui constitue le point de départ de toutes ces garanties.
Quelles sont les assurances construction obligatoires ?
Afin de s’assurer contre tout désordre résultant d’un sinistre pour lesquels la responsabilité des constructeurs pourrait être engagée sur le fondement de la présomption des articles 1792 et suivants du Code civil, il existe bien des assurances obligatoires :
Les sinistres existants et non totalement incorporés dans l’ouvrage neuf sont exclus de ce dispositif, de la même manière que les dommages immatériels lorsqu’aucune clause de la police d’assurance ne garantit ces derniers.
De plus, la police d’assurance doit inclure des clauses types, soit celles prévues à l’article A. 243-1 du Code des assurances. Autrement, en cas de défaut d’assurance ou de mauvaise rédaction de la police, le constructeur peut être sanctionné pénalement d’un an d’emprisonnement et d’une amende pouvant aller jusqu’à 75.000 euros.
Ainsi, conformément aux dispositions du Code civil, il existe une double obligation d’assurance à la charge du constructeur. L’assurance dommage-ouvrage permet, par ailleurs, à ce dernier de bénéficier d’un préfinancement rapide des travaux de reprise en cas de survenance d’un sinistre, et ce, avant toute recherche de responsabilité.
C’est donc la compagnie d’assurance qui préfinance sans toutefois conserver la charge finale de la réparation. Subrogé dans les droits du maître d’ouvrage, il pourra se retourner contre le constructeur dont la responsabilité a été établie.
Quelles sont les règles spécifiques pour chacune des assurances obligatoires ?
L’assurance de responsabilité décennale est obligatoire pour les constructeurs et assimilés (article 1792-1 du Code civil), pour les constructions de maisons individuelles et les vendeurs d’immeubles à construire. Sont par exemple concernés les architectes, vendeur d’immeubles à construire, promoteur immobilier, etc. Précisons néanmoins que les sous-traitants ainsi que les coordonnateurs SPS ne sont pas soumis à l’obligation d’assurance.
Ainsi, l’article 1792 du Code civil fait peser sur les constructeurs une présomption de responsabilité pour les dommages qui compromettent la solidité de l’ouvrage ou qui rendent les équipements impropres à l’utilisation. Le maître d’ouvrage ou son acquéreur pourra également faire engager la responsabilité dudit constructeur lorsqu’il est à l’origine de dommages affectant les éléments d’équipement qui font corps avec les ouvrages de viabilité, de fondation, d’ossature, de clos ou de couvert.
L’assurance dommages-ouvrage est quant à elle obligatoire pour toute personne physique ou morale propriétaire, vendeur ou mandataire du propriétaire de l’ouvrage qui fait réaliser les travaux.
Permettant à son bénéficiaire (le propriétaire de l’ouvrage et les propriétaires successifs) de préfinancer les travaux de réparation sans avoir à démontrer la responsabilité du constructeur, elle ouvre à droit d’exercice de recours subrogatoire à l’assureur après indemnisation du maître d’ouvrage.
Bien évidemment, il existe certains délais à respecter à compter de la déclaration de sinistre, conformément à l’article L. 242-1 du Code des assurances. S’il ne suit pas ce calendrier à la lettre, l’assureur pourrait se retrouver dans l’impossibilité de contester le principe d’indemnisation.
Contrôle du respect de l'obligation d'assurance
Les personnes soumises à l'obligation d'assurance dommages-ouvrage ou de responsabilité décennale doivent pouvoir justifier qu'elles sont en règle dès la déclaration d'ouverture du chantier.
La quittance de paiement de la prime ou encore l'attestation d'assurance fournie par l'assureur font foi.
En revanche, la note de couverture établie par un courtier d'assurances n'est pas une preuve de la souscription de l'assurance obligatoire (Cour d'appel Paris, 23ème Ch. 2 février 2000, SA AM Prudence C/ HERMIER).
S'agissant du contrat de construction de maison individuelle, le dispositif de protection est renforcé : en application de l'article L 242-1 du Code des assurances, il doit comporter la référence de l'assurance de dommages souscrite par le maître de l'ouvrage. À défaut de cette stipulation expresse, le contrat de construction de maison individuelle est nul.
Le contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plan peut toutefois être conclu sous la condition suspensive de l'obtention de l'assurance dommages-ouvrage (article L.231-4 CCH). La non-survenance d'une telle condition rendra le contrat caduc.
À tout moment pendant la réalisation du chantier, le maître de l'ouvrage peut demander au constructeur la justification de sa couverture d'assurance.
Si le constructeur refuse d'y déférer, le maître de l'ouvrage est en droit de suspendre le paiement des travaux (Cour d'appel Montpellier, 1ère Ch. 6 mai 2003, Lamour C/ SARL Daniel Travaux Publics).
Si le maître d'ouvrage a conclu un contrat avec un maître d'œuvre chargé du suivi du chantier, c'est ce dernier qui a l'obligation de vérifier que le constructeur dont il avalise le devis est bien loti des assurances obligatoires.
La non-souscription d'une assurance obligatoire est passible d'une peine d'emprisonnement de six mois et d'une amende de 75000 € (article L .243-3 al. 1er du Code des assurances.).
Enfin, le maître d'ouvrage est en droit de se prévaloir de l'absence d'assurance obligatoire devant les juridictions civiles afin de demander des dommages et intérêts contre le constructeur défaillant sur le fondement de la perte d'une chance d'être indemnisé en cas de sinistre.
Avocats Picovschi, compétent en droit de la construction à Paris, vous assiste dans le cadre de contentieux relatifs aux contrats d’assurance obligatoire.