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Vous vouliez vendre ou acheter un bien immobilier (maison individuelle, appartement, immeuble en copropriété), mais la mairie a exercé son droit de préemption ? Depuis, il ne se passe rien ? Quels sont vos recours ? La mairie agit-elle dans les strictes limites de la loi ? Avocats Picovschi vous éclaire sur la notion de droit de préemption et vous aide à y voir plus clair sur les modalités d’exercice de ce droit.
Qu’est-ce que le droit de préemption et à quelles conditions doit-il s’exercer ?
En vertu de l’article L211-1 du Code de l’urbanisme, une collectivité publique, comme les collectivités territoriales ou mairies, dispose d’un droit de préemption urbain (DPU) dans certaines zones préalablement définies, en vue de réalisation, dans l’intérêt général, d’actions et d’opérations d’aménagement définies. Ce droit lui permet d’acquérir en priorité un bien mis en vente (tant par un particulier que par une personne morale).
Le périmètre du droit de préemption urbain est fixé par délibération du Conseil municipal de votre ville, il concerne généralement les communes dotées d’un Plan Local d’Urbanisme (PLU).
Le vendeur n’est alors plus libre de vendre à la personne de son choix ni aux conditions qu’il souhaite. Lorsqu’il souhaite proposer à la vente son bien, le propriétaire doit informer la mairie de son intention par le biais d’une déclaration d’intention d’aliéner qui est envoyée par le notaire.
Celle-ci a alors trois options :
- Elle émet clairement une réponse négative : elle ne souhaite pas préempter ;
- Elle préempte : elle veut acheter le bien avec ou sans réserve ;
- Elle reste silencieuse durant les 2 mois suivant la déclaration d’intention d’aliéner. Ce silence vaut renonciation au droit de préemption.
Naturellement, seul un cas parmi les trois cas énoncés peut vous poser un problème à savoir, lorsque la commune décide de préempter le bien que vous avez mis en vente ou que vous souhaitiez acheter !
Notons qu’elle n'est pas obligée d'acquérir la totalité du bien préempté et qu’elle peut parfaitement décider d’acheter qu'une partie de ce bien.
Lorsqu’elle décide de préempter, elle peut le faire aux conditions fixées par le vendeur, mais elle peut aussi renégocier les conditions de la vente ! Elle propose alors un nouveau prix par lettre recommandée avec accusé de réception (toujours dans le délai de deux mois).
En tant que vendeur, vous avez alors le choix dans le délai de deux mois suivant la réception de cette nouvelle lettre, de :
- Renoncer à la vente
- Accepter la vente aux nouvelles conditions proposées
Maintenir votre première offre : dans ce cas, la commune peut saisir le Tribunal de Grande Instance pour que le juge fixe le prix de la vente.
La décision de préemption de la mairie : quels recours ?
La décision de préempter doit être motivée, c’est-à-dire qu’elle doit absolument préciser l’objectif poursuivi qui doit être d’intérêt général. À titre d’exemple, on peut citer la construction de logements sociaux ou encore la lutte contre l’insalubrité.
La mairie doit afficher pendant deux mois sa décision et faire procéder à sa publication dans les journaux départementaux.
Un recours est possible contre cette décision de préemption dès lors qu’elle n’est pas assez motivée. Il est possible de demander son annulation.
ATTENTION : il faut alors agir dans des délais précis et devant le juge compétent. Les délais sont très courts, notamment pour la saisine du juge administratif contre la décision de préemption, le délai est fixé à deux mois à compter de la réception de la décision. De même, le vendeur dispose d’un délai de deux mois pour contester une décision de préemption à un prix inférieur, un silence de la part du vendeur équivaut à une renonciation de la vente.
A noter que, lorsque le vendeur maintien son prix, la mairie dispose d’un délai de 15 jours pour saisir le juge de l’expropriation. A défaut, elle est réputée avoir renoncé à la préemption, et le vendeur peut céder son bien librement, au prix de la promesse de vente.
L’annulation de la décision de préemption engendre des conséquences importantes tant pour le vendeur que pour l’acquéreur évincé. L’acquéreur évincé peut demander des dommages et intérêts dès lors qu’il avait déjà signé un compromis de vente, engagé des dépenses avant l’exercice du droit de préemption.
Le vendeur reste propriétaire si le transfert de propriété n’a pas eu lieu. Et même lorsque le transfert de propriété au profit de la commune a eu lieu, il n’est pas forcément trop tard ! La vente peut elle aussi être annulée.
Afin d’être conseillé au mieux et de mettre toutes les chances de votre côté, le recours à l’avocat en droit immobilier est incontournable.
Que se passe-t-il quand la commune ne respecte pas ses engagements ?
En tant que vendeur ou en tant qu’acquéreur évincé vous avez un droit de regard sur ce que fait réellement la commune du bien qu’elle a préempté ! Gardez donc bien un œil sur la suite des opérations ! Vous êtes en droit de vérifier l’utilisation qu’elle en fait et de vous demander si cette utilisation est conforme à l’objectif défini dans sa décision de préemption.
La commune ne réalise pas le projet pour lequel elle avait décidé de préempter, que faire ?
Vous disposez d’un droit de rétrocession qui est la conséquence de votre droit de regard. Si le bien a été acquis depuis moins de cinq ans et que vous observez que la mairie n’a pas réalisé les opérations pour lesquelles elle a exercé son droit de préemption, vous avez le droit de lui demander de vous céder à nouveau le bien. La commune doit d’abord proposer le bien au vendeur puis à l’acquéreur si le vendeur n’a pas souhaité acheter.
Qu’en est-il du prix de vente ?
Elle doit payer le prix de vente dans le délai de six mois suivant la réalisation de la vente. Si elle ne le fait pas, là encore, vous pouvez mettre en œuvre votre droit de rétrocession.
En somme, loin d’être un long fleuve tranquille, cette procédure de préemption peut s’avérer être, au contraire, un véritable chemin miné ! Agir à temps et devant le juge compétent, savoir déceler les erreurs commises par la commune (motivation, non-respect des délais imposés, utilisation du bien), là est le point fort de l’avocat.