Ecrit par : Pauline LEBON, Avocats Picovschi
SOMMAIRE
Vous vouliez vendre votre bien immobilier, mais la Mairie a souhaité exercer son droit de préemption ? Qu’en est-il du prix de vente ? Qu’est-ce que la mairie a fait du bien réellement ? Quels sont vos recours ? Avez-vous déjà entendu parler du droit de rétrocession.
Naissance de conflits liés au droit de préemption
En tant que vendeur vous avez un droit de regard sur ce que fait réellement la commune du bien qu’elle a préempté ! Non seulement la préemption de la Mairie a évincé l’acquéreur que vous aviez peut-être eu du mal à trouver et qui souhaitait profondément acquérir votre bien, mais en plus cette préemption ne se trouve finalement pas justifiée et vous avez du mal à vous faire payer le prix ? Vous êtes en droit de vérifier l’utilisation que la Commune en fait et de vous demander si cette utilisation est conforme à l’objectif défini dans sa décision de préemption. Vous avez également le droit de vous demander ce qu’il en est du prix !
La commune ne respecte pas ses obligations, faites valoir votre droit de rétrocession !
Il existe deux cas de figure dans lesquels vous pouvez mettre en œuvre votre droit de rétrocession, c’est-à-dire récupérer votre bien.
Soit la commune a préempté et elle n’a pas accompli le projet qui motivait sa décision de préemption, soit elle n’a pas payé ou consigné le prix de vente dans le délai imparti.
Si le bien a été acquis depuis moins de cinq ans et que vous observez que la Mairie n’a pas réalisé les opérations pour lesquelles elle a exercé son droit de préemption, vous avez le droit de lui demander de vous céder à nouveau le bien. La Commune doit d’abord vous proposer le bien ; c’est seulement si vous ne souhaitiez pas acheter qu’elle peut le proposer à l’acquéreur.
En effet, la Commune doit justifier, motiver sa décision de préempter ; elle doit absolument préciser l’objectif poursuivi qui doit être d’intérêt général. Ce droit de préemption lui est justement accordé pour lui permettre d’accomplir des projets d’utilité publique ; c’est cela qui justifie qu’elle est prioritaire pour acheter. Or, si finalement elle ne réalise pas l’opération envisagée, le droit de préemption dont elle a bénéficié ne se justifie plus !
Notons qu’un recours est possible contre cette décision de préemption. Dès lors qu’elle n’est pas assez motivée, il est possible de demander annulation de la décision de préemption.
De surcroît, la Marie doit payer le prix dans le délai de six mois suivant la réalisation de la vente (transfert de propriété). Si elle ne le fait pas ou si le prix n’est pas consigné, là encore, vous pouvez mettre en œuvre votre droit de rétrocession.
L’exercice du droit de rétrocession
Cette rétrocession s'opère par acte authentique si un acte de même nature a déjà constaté le transfert de propriété, elle intervient par acte sous seing privé si aucun acte authentique n'a encore constaté le transfert de propriété. À compter de la date de rétrocession du bien, ce dernier peut être librement vendu par le vendeur, quels que soient le prix et les conditions de la vente, sans qu'il y ait à notifier une nouvelle déclaration d’intention d’aliéner.
Par exemple, il résulte d’un arrêt de la Cour de Cassation (Civile 3, 15 décembre 1999) que la rétrocession a été imposée à une commune qui avait préempté en vue de l'extension du cimetière et la création d'un espace vert public puis avait procédé à des échanges de terrains en sorte qu'aucun des buts fixés n'avait été atteint. Les juges de la Cour d’appel avaient également accordé des dommages et intérêts.
Une réponse ministérielle est également venue préciser que le droit de rétrocession s'impose dans tous les cas et ce y compris lorsque la non-utilisation ne concerne qu'une fraction du terrain préempté.
La rétrocession vous permet ensuite de vendre librement votre bien.
En outre, exercer le droit de rétrocession n’est pas l’unique choix proposé au vendeur. Par exemple, les juges de la Cour de cassation ont déjà permis au vendeur d’agir contre la commune en réalisation forcée de la vente à défaut de paiement du prix (Civile 3, 2 juin 1999).