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Nu-propriétaire : quel recours en cas de conflit avec l'usufruitier ?

| Mis à jour le 30/08/2021 | Publié le 13/03/2014

Nu propriétaire et conflit avec l'usufruitier

SOMMAIRE

Vous êtes dans le cadre d’un démembrement de propriété, notamment parce que vous venez d’hériter d’un bien avec d’autres cohéritiers ou que vous avez fait l’objet d’une donation avec réserve d’usufruit… et en tant que nu-propriétaire vous souhaitez faire valoir vos droits et vous assurer que l’usufruitier respecte ses obligations. Comment régler ces conflits entre nu-propriétaire et usufruitier ? Comment forcer l’autre partie à agir ? Est-il possible de casser un usufruit ? Avocats Picovschi fait le point avec vous.

Définition de l’usufruit et de la nue-propriété

Le droit de propriété correspond au droit pour une personne d’utiliser le bien, d’en percevoir des revenus et d’en disposer comme bon lui semble. Il peut arriver, pour diverses raisons, que ce droit soit démembré. Dans ce cas, on distingue l’usufruit de la nue-propriété.

Le démembrement de propriété peut avoir une origine contractuelle (donation, vente, testament) ou une origine légale (règle de dévolution successorale à l’égard du conjoint survivant). À titre d’exemple, dans le cadre d’une donation, il peut arriver fréquemment que les parents transmettent le bien à leurs enfants en se réservant l’usufruit.

L’usufruit 

L’usufruit est défini par l’article 578 du Code civil comme « le droit de jouir des choses dont un autre a la propriété, comme le propriétaire lui-même, mais à la charge d'en conserver la substance. »  C’est donc le droit d’user et de disposer des revenus pour l’usufruitier. Pour un usufruit portant sur un immeuble, l’usufruitier est le seul à percevoir l’intégralité des loyers. S’il s’agit d’un usufruit d’une exploitation agricole, l’usufruitier profitera des récoltes.

Ce droit d’usufruit est généralement temporaire. En contrepartie, l’usufruitier a l’obligation de conserver le bien. A ce titre, il ne peut pas le vendre à un tiers et doit le restituer au nu-propriétaire dans l’état dans lequel il l’a reçu.

L’usufruitier doit fournir des garanties de bonne conservation au nu-propriétaire :

  • Il doit exercer un inventaire à l’ouverture et à l’extinction de l’usufruit ;
  • Il doit apporter une caution.

La nue-propriété

La nue-propriété est le droit de disposer du bien par le nu-propriétaire. Il a donc la possibilité de vendre, donner ou léguer ce bien, sous réserve de respecter les droits de l’usufruitier. En effet, il doit permettre à l’usufruitier de jouir paisiblement de son bien. Cependant, il a vocation à retrouver la pleine propriété à la fin de l’usufruit.

Démembrement d’un bien immobilier : les différents cas à envisager

Conclusion de baux

Il faut distinguer selon qu’il s’agit d’un bail d’habitation ou d’un bail commercial. L’usufruitier peut conclure seul un bail d’habitation, sauf dans le cas où celui-ci est conclu pour une durée supérieure à 9 ans. En revanche, il a besoin de l’accord du nu-propriétaire pour conclure un bail commercial (ou rural) ou son renouvellement.

Assemblée de copropriété

Le nu-propriétaire et l’usufruitier sont dans l’obligation d’être représentés par un mandataire commun dans l’hypothèse où le bien démembré est en copropriété. Cette règle est justifiée par l’indivisibilité du droit de vote.

Vente et partage

Il faut l’accord à la fois du nu-propriétaire et de l’usufruitier pour pouvoir vendre le bien immobilier dans son entièreté (c’est-à-dire pour transférer sa pleine propriété) puisque, dans ce cas, ils vendent bien tous deux leurs droits respectifs.

L’absence d’accord mutuel du nu-propriétaire et de l’usufruitier pour la vente est sanctionnée par la Cour de cassation qui rappelle de manière systématique et encore récemment dans un arrêt du 13 juin 2019 que « le juge ne peut (…) ordonner la vente de la pleine propriété d’un bien grevé d’usufruit contre la volonté de l’usufruitier ». En l’espèce, la vente du bien sur licitation avait été autorisée en appel à la demande d’un créancier de l’un des nus-propriétaires alors que l’usufruitière s’opposait à la cession (Cass., 1ère civ. 13 juin 2019, n°18-17.347).

En revanche, le démembrement n’étant pas une situation d’indivision, il n’est pas possible de demander le partage du bien.

  • Obligation aux charges

Par principe, les travaux d’entretien sont à la charge de l’usufruitier, en vertu de son obligation de conservation du bien, et les grosses réparations sont à supporter par le nu-propriétaire, sauf si elles résultent du défaut d’entretien de l’usufruitier (article 605 du Code civil). Cependant, il est possible de prévoir un autre mode de répartition des charges entre usufruitier et nu-propriétaire dans l’acte de démembrement.

Action du nu-propriétaire contre les actes de l’usufruitier

Même si l’usufruitier et le nu-propriétaire sont indépendants quant à la gestion du bien, l’usufruitier ne peut user du bien sans l’accord du nu-propriétaire. Dans tous les cas où l’usufruitier ne respecte pas les règles énoncées précédemment, le nu-propriétaire peut agir judiciairement, soit pour faire annuler des actes que l’usufruitier aurait pris abusivement ou le contraindre au contraire à agir en cas de carence, soit encore de manière plus radicale pour faire cesser l’usufruit.

Ainsi, l’usage du bien par l’usufruitier est parfois soumis à l’autorisation du nu-propriétaire. Le nu-propriétaire pourra donc demander l’annulation d’un bail consenti par l’usufruitier sans attendre la fin de l’usufruit lorsqu’il s’agit d’un bail commercial ou rural. Le renouvellement d’un bail commercial devra également être subordonné à l’autorisation du nu-propriétaire.

Dans le cas où une autorisation préalable du nu-propriétaire doit être obtenue, c’est à l’usufruitier de faire la démarche en ce sens. Le locataire aurait par conséquent la possibilité de réclamer des dommages et intérêts, dans le cas où le bail serait annulé parce que l’usufruitier aurait agi sans le consentement du nu-propriétaire.

Seul le nu-propriétaire a la possibilité de demander la nullité des actes pris par l’usufruitier sans son accord.

La haute juridiction a notamment pu préciser que le nu-propriétaire, devenu complètement propriétaire du bien du fait du décès de l’usufruitier, pouvait contester les actes commis par ce dernier sans l’avoir prévenu. Le fait que l’usufruitier soit décédé ne fait pas perdre au nu-propriétaire son droit de demander l’annulation de l’acte. En l’espèce, il s’agissait d’une mère usufruitière, qui avait consenti un bail rural, sans demander l’autorisation de sa fille. Après le décès de la mère, la fille a obtenu l’entière propriété du bien et avait donc la possibilité de demander l’annulation du bail (Cass., 3e civ., 9 décembre 2009, n° 08-20.133).

Le nu-propriétaire a également la possibilité de contraindre l’usufruitier, pendant la durée de l’usufruit, à effectuer les réparations d’entretien qui sont importantes pour la conservation du bien (par exemple les travaux de ravalement d’un immeuble).

Concernant l’extinction de l’usufruit, elle intervient lorsque :

  • L’usufruitier décède ;
  • La durée pour laquelle il a été accordé expire ;
  • La pleine propriété est recouvrée par une seule et même personne ;
  • Aucun usage n’en a été fait pendant trente ans ;
  • La chose qui en est l’objet est totalement perdue.

En dehors de ces causes d’extinction « naturelles », peut-on casser un usufruit. Le nu-propriétaire peut en effet demander la cessation de l’usufruit dans le cas où l’usufruitier commettrait des abus en usant du bien, tels que la dégradation du bien, ou le défaut d’entretien entrainant un dépérissement de l’immeuble. Il peut également amener l’usufruitier à payer les frais de réparation pour les dommages qu’il aurait causés à la chose.

Cependant le juge peut également se prononcer en faveur d’une alternative à l’extinction absolue de l’usufruit et octroyer la jouissance du bien au nu-propriétaire moyennant le versement annuel d’une somme à l’usufruitier pour toute la durée initiale de l’usufruit.

Dans le même esprit, le nu-propriétaire a la faculté de racheter l’usufruit de l’usufruitier en lui versant un capital. Cette conversion suppose de déterminer la valeur de l’usufruit. Pour y parvenir, Il faut se référer à un barème fiscal fixant forfaitairement la valeur de l’usufruit en fonction de l’âge de l’usufruitier. 

Pour pouvoir faire valoir vos droits, il est primordial de s’entourer d’un avocat compétent en droit immobilier. Avocats Picovschi, expert en droit immobilier, se tient à votre disposition en cas de différend avec l’usufruitier d’un bien dont vous êtes nu-propriétaire.

Sources : articles 578, 582, 599, 605, 617, 618, 619 du Code civil ; Cass., 3e civ., 9 décembre 2009, n° 08-20.133 ; Cass., 1ère civ. 13 juin 2019, n°18-17.347).

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